Je suis la conscience des plantes de Viridis Terra Pérou et je vais vous raconter pourquoi je suis ici. Je cherche à répondre à la grande question philosophique de tous les temps, pourquoi est-ce que j’existe? Ma réponse, bien qu’ambitieuse, est vraie : avoir un impact positif sur ce monde. Par des actions spécifiques telles que le reboisement, la restauration, la réhabilitation et la conservation des terres dégradées, les communautés locales et les investisseurs dédiés à l’amélioration de la planète travaillent ensemble pour élever ma conscience.
Aujourd’hui, je m’adresse à vous depuis la pépinière forestière de l’Institut de l’Enseignement Supérieur Technologique Public (IESTP) SUISSE, situé dans la ville de Pucallpa. La récupération de cette pépinière a été possible grâce à un accord entre Viridis Terra Pérou et l’IESTP Suisse, en août de cette année (2021).
Avant même de débuter la germination, l’équipe sur le terrain a dû faire face à la tâche ardue de trouver une solution viable afin d’atteindre l’objectif de produire 60 000 plants avant la fin de l’année. Pas de temps à perdre, il nous fallait une équipe possédant de nombreuses compétences! Le chef de la pépinière actuelle, le jeune ingénieur forestier Napoleón Flores, a convoqué ses meilleurs alliés pour donner vie au centre de production végétale.
« J’ai commencé par rassembler une équipe. Tout d’abord, j’ai engagé Hacela Pérez, notre technicienne forestière pour les pépinières. Ensuite, j’ai eu la tâche titanesque de chercher la pépinière. Nous en avons visité plusieurs et la seule qui répondait aux conditions d’infrastructure de base était celle-ci [de l’IESTP Suisse]. Il s’agissait du site d’un ancien projet abandonné, Fondebosque (Fonds pour la Promotion de l’Aménagement Forestier) », explique Napoleón Flores.
Après avoir conclu que la pépinière forestière remplissait les conditions pour pouvoir faire la production de plants à grande échelle, l’accord entre Viridis Terra et le directeur de l’institut, le Dr. Jorge Antonio Córdova Correa, a été conclu. Ainsi, Viridis Terra Pérou valorise un ancien investissement de l’État, reprenant ce pour quoi il a été créé, en plus de le gérer de manière inclusive pour les étudiants. Cet accord est d’autant plus intéressant étant donné que, plus tard, les étudiants qui auront pu se familiariser avec les technologies de la pépinière, seront encore mieux préparés au marché du travail.
Tâche suivante, la recherche de semences. « Nous n’avions pas beaucoup de temps parce que l’un des goulots d’étranglement de la production est la disponibilité des semences, qui est une fonction du cycle phénologique des arbres. Comme nous savions très bien qu’à cette époque nous étions en production de shihuahuaco, nous devions faire un calendrier et atteindre les objectifs d’approvisionnement. C’est l’une des principales limites lorsque vous produisez des espèces indigènes », explique Napoleón Flores.
De plus, pour former l’équipe en un temps record, il était essentiel de réunir un personnel expérimenté dans les pépinières et ayant des connaissances appropriées dans les technologies. La pépinière a été construite en moins d’une semaine par quatre personnes. Aujourd’hui, ils y sont sept.
L'espace de paix et d'harmonie dont je parle aujourd'hui semblait abandonné. On y retrouvait de l'herbe et des déchets, sans moteur hydraulique pour irriguer.
« Hacela Pérez est la technicienne responsable — elle est la mère des plantes, la meilleure de la région », explique Napoléon.
Moi, la conscience des plantes, je suis témoin de l’amour de Hacela pour ses filles. Elle leur chante même un mantra de la thérapie Homa, dans une langue qu’elle ne connaît pas, le sanskrit. Hacela Pérez a travaillé sur un projet dans lequel ils chantaient aux plantes trois fois par jour pour élever leur vibration. « C'était vrai. Parce que quand nous chantions, nos plantes poussaient plus vite et plus belles. Et je m'en souviens et je fais le tour de la pépinière en chantant ma chanson. », mentionne en souriant Hacela.
Pour qu’il y ait une conscience, il doit y avoir une existence. Les choses se sont donc mises en branle. La pépinière forestière s’est divisée en trois zones: la plantation, la croissance et la rusticité.
Pour la plantation d’espèces indigènes; shihuahuaco, pin chuncho aussi appelé pashaco, cèdre, acajou, marupa et capirona; la préparation du substrat est réalisée avec des intrants de la région. Sciure de bois décomposée, enveloppe de riz semi-carbonisée, poulets qui provient des hangars et de la fibre de noix de coco importée. Cette formule, entièrement biologique, fournit un engrais de grande qualité.
Il est également important de sélectionner des semences d’arbres plus, pour assurer la qualité, une bonne production et la réussite de la plantation. Dans cette pépinière, les graines ont des origines diverses de la jungle, « pour garantir l’enrichissement génétique, car Viridis Terra envisage également l’amélioration génétique de nos espèces indigènes. Ainsi, nous aurons nos propres semis », dit Napoléon.
Certaines graines telles que celles de l’arbre shihuahuaco doivent être fendues pour voir si elles germent à l’intérieur, et lorsque cela se produit, elles sont placées dans des lits de semences pour poursuivre le processus de germination. Lors du démarrage de la croissance des plantes, elles sont passées aux tubes, où elles resteront d’une semaine à dix jours pour développer des racines solides.
Tandis que de l’autre côté, la graine de pin chuncho est un semis direct. En faisant une incision à une extrémité de la graine et en la laissant tremper pendant quelques jours, une prégermination est obtenue, techniquement appelée « scarification ». Une fois que le germe apparaît, il est placé dans un tube.
Comment ces espèces indigènes ont-elles été choisies? « Tout a été discuté avec les agriculteurs. Nous n’imposons pas d’espèces. Après avoir évalué les sols, nous fournissons la partie technique pour choisir les espèces et ils décident lesquelles cultiver », explique Napoleón Flores. Les intérêts des futurs partenaires sont ainsi pris en compte, de même que les conditions de qualité des zones à restaurer et les aspects liés à la partie commerciale, afin de fournir aux producteurs de bonnes options pour la vente de produits à court, moyen et long terme.
Une fois les plantes racinées prélevées, elles sont acheminées vers la zone de croissance pour un mois. « Nous devons effectuer la gestion des plantes, car par exemple, si elles sont trop exposées au soleil, elles mourront. Nous sommes en train de terminer de les couvrir. Plus tard, nous les découvrons complètement afin que les jeunes plants résistent au soleil et à la pluie », explique Hacela Pérez.
Cet espace sert désormais également aux étudiants de l’IESTP Suisse, qui s’intéressent à l’apprentissage de ces techniques. Ils constatent par exemple que les méthodes de plantation dans des tubes sont préférables à celles qu’ils privilégiaient, à l’aide des sacs, et avec lesquelles les racines s’emmêlaient. Ou encore que les gicleurs distribuent beaucoup mieux l’eau que les tuyaux qu’ils utilisaient traditionnellement.
Dans les conteneurs recouverts de mailles rouges, lorsque les plantes atteignent une hauteur comprise entre 10 et 15 centimètres, l’ « amincissement » est effectué. C’est-à-dire l’action de sélectionner par tailles pour atteindre une croissance uniforme et emmener les plus grands dans un autre tunnel avec une plus grande exposition au soleil. Ceci est nécessaire pour que l’eau des gicleurs pénètre bien dans chaque tube.
Comme on peut le constater, pour donner vie à ces 60 000 plantes, composées principalement de 30 000 semis de shihuahuaco et 20 000 de pin chuncho, mes pépiniéristes ont amélioré les processus pour les rendre efficaces et productifs. Hacela Pérez se souvient qu’avant, lorsque l’on travaillait avec des sacs, la plantation et la culture de semis prenaient plus de temps. Elle sait maintenant qu’avec l’utilisation de plateaux et de tubes, tout devient plus pratique et on parvient à augmenter considérablement la quantité de cultures.
Enfin, les semis sont transférés dans la zone de rusticité sur des tables métalliques où le contrôle des arbres est effectué. Par la suite, ils passeront environ un mois dans des conditions plus difficiles afin qu’ils s’adaptent à ce qui se rapproche de la réalité à laquelle ils seront confrontés lorsqu’ils seront ensemencés sur le terrain. Comme le souligne Napoléon, « ici, les plantes reçoivent un rayonnement solaire direct, sans maillage. Nous faisons un contrôle de l’eau, nous essayons de restreindre leur apport en eau parce qu’une fois qu’elles seront au champ, elles n’auront pas quelqu’un pour les arroser constamment. »
La saison des pluies de la forêt amazonienne approche et il sera temps d’envoyer les meilleurs plants dans les propriétés de Nueva Palestina et San Alejandro, département d’Ucayali, pour les partenaires agricoles de Viridis Terra Pérou. Dans le cas où certaines plantes ne résistent pas au changement, mes pépiniéristes ont déjà une réserve toute prête.
À suivre…
Florence Couillaud.