La compensation de la biodiversité est une approche permettant d’atténuer les impacts environnementaux d’un projet de développement. Le développeur, qui peut être un acteur privé ou public, compense la perte de biodiversité causée par son projet en augmentant la biodiversité ailleurs. Le concept de la compensation de biodiversité est apparu dans les années 1980 aux États-Unis dans l’optique d’utiliser le libre-marché en complémentarité avec les lois et politiques environnementales.
Les politiques de compensation de biodiversité sont utilisées dans plus de 33 pays et ont ainsi contribué à restaurer et protéger environ 8,3 millions d’hectares d’écosystèmes Bennett et al., 2017. Selon les données de 2017-2019 de l’OCDE, le budget global de la biodiversité, incluant les gouvernements et le secteur privé, se situe entre 78 et 90 milliards USD par année.
Il importe de mentionner que la compensation de la biodiversité doit être vue comme une solution de dernier recours ; c’est-à-dire qu’on doit l’utiliser seulement lorsque tous les efforts ont été déployés par le développeur pour éviter et réduire son impact environnemental.
Lorsque ces deux types de mesures ne suffisent pas, il peut alors se tourner vers la compensation pour effacer sa perte de biodiversité par un gain équivalent généré sur un autre site. On génère des crédits de biodiversité sur ces sites de compensation en protégeant des milieux existants, en restaurant des écosystèmes dégradés ou encore en en créant de nouveaux de toutes pièces.
Par exemple, le modèle d’aménagement et de protection mis en place par Viridis Terra, par le biais du fonds d’impact TreesOfLives, permet d’améliorer la biodiversité du territoire d’intervention. Cette amélioration se traduit par l’augmentation de la « Qualité » (Q) des écosystèmes. La Qualité se calcule en comparant les caractéristiques des écosystèmes évalués à celles d’une forêt naturelle.
Le capital naturel représente le stock d’écosystèmes présent dans un territoire donné. Comme le capital financier, il génère des intérêts. Les intérêts produits par le capital naturel sont appelés les services écologiques, c’est-à-dire les avantages générés par les écosystèmes restaurés et les forêts naturelles. Les services écologiques sont nombreux et comprennent, entre autres, des bénéfices tangibles comme le bois, la nourriture et les extraits médicinaux.
D’autres services écologiques sont moins visibles comme la réduction des gaz à effet de serre, la purification de l’eau, la réduction des inondations, l’esthétique du paysage, etc. En additionnant la valeur de tous les services écologiques fournis par un écosystème, on peut calculer la valeur monétaire du capital naturel.
En aménageant des écosystèmes productifs et en protégeant des forêts naturelles, les projets de Viridis Terra contribuent donc à accroître la valeur du capital naturel des écosystèmes.
De plus, cet accroissement de biodiversité va de pair avec une plus grande résilience, ce qui confère aux sites aménagés une résistance vis-à-vis les aléas comme les évènements météorologiques extrêmes dus au changement climatique. En plus de profiter aux populations locales, cette résilience sera appréciée également des éventuels investisseurs en réduisant leurs risques.
Le projet de Sinchi Roca dans l’Amazonie péruvienne couvre 5100 hectares, répartis entre cinq types d’intervention :
Pour les quatre premiers types d’aménagement, il est estimé que le projet de Viridis Terra générera un gain de Qualité de 10 à 20 % sur 30 ans. Le détail pour chaque type est présenté dans le tableau 1.
Type d'intervention | Gain en Qualité |
---|---|
SAF | 20 % |
SSP | 20 % |
PF | 20 % |
RNA | 10 % |
Protection | 0 % |
Le tableau 2 présente des estimés de l’augmentation de la valeur du capital naturel pour les différents types d’intervention. Pour chaque hectare aménagé, Viridis Terra s’engage à protéger un hectare de forêt naturelle. On ne prévoit pas de gain de qualité dans ces forêts sous protection. Toutefois, sans cette protection, on y noterait une dégradation graduelle, étant donné que la forêt amazonienne disparait à un rythme soutenu. C’est pourquoi, on estime gagner sur 30 ans près d’un demi-hectare (0,44 ha) de forêt pour chaque hectare protégé. C’est ce que l’on appelle la « perte évitée ».
Type d’intervention | Valeur avant le projet | Valeur estimée à l’an 30 | Gain en capital naturel |
---|---|---|---|
SAF | 52 000 | 281 906 | 229 906 |
SSP | 50 000 | 82 463 | 32 463 |
PF | 52 000 | 109 305 | 57 305 |
RNA | 130 000 | 140 010 | 10 010 |
Protection | 200 000 | 200 000 | 0 |
Perte évitée | 0 | 88 800 | 88 800 |
Les gains en matière de biodiversité sont calculés à l’aide de l’indice « qualité-hectare » ou QH, soit le nombre d’hectares multiplié par la Qualité. À Sinchi Roca, un gain de 1200 QH de forêt amazonienne est estimé sur 30 ans (tableau 3). Cela inclut la perte évitée de 746 QH. Un des résultats prévus du projet de Sinchi Roca est l’amélioration de l’habitat du jaguar, une espèce en déclin, laquelle se traduirait par un gain de plus de 1000 QH.
Ces gains de forêt amazonienne et d’habitat du jaguar pourraient être vendus pour compenser la perte d’habitat causée par un projet industriel en Amazonie, tel que requis par la loi péruvienne ou les Principes d’Équateur.
En effet, ces exigences environnementales requièrent qu’il n’y ait aucune perte nette de biodiversité. Cela signifie que les pertes engendrées par de tels développements doivent être compensées par des gains comme ceux que Viridis Terra estime réaliser à Sinchi Roca.
Il est estimé que le gain en capital naturel sur 30 ans soit à hauteur de 444 millions USD pour l’ensemble du projet. Le tableau 3 présente les gains espérés pour chacun des types d’intervention en USD (2020). Les gains les plus élevés proviennent des aménagements agroforestiers et de la perte évitée de forêt naturelle.
Type d’intervention | Superficie (ha) | Gain de forêt tropicale (QH) | Gain en habitat du jaguar (QH) | Gain en capital naturel (millions USD) |
---|---|---|---|---|
SAF | 840 | 167 | 100 | 193 |
SSP | 630 | 103 | 41 | 20 |
PF | 630 | 111 | 78 | 36 |
RNA | 900 | 91 | 73 | 9 |
Protection | 2100 | 0 | 0 | 0 |
Perte évitée | - | 746 | 746 | 186 |
Total | 5100 | 1219 | 1039 | 444 |
Au plan social, cet accroissement du capital naturel signifie que la population locale pourra bénéficier de davantage de sécurité, d’une meilleure santé et d’un capital social plus riche.
Les riverains du fleuve Ucayali bénéficieront d’une meilleure qualité de l’eau et de moins de risques d’inondation. Enfin, pour la population mondiale, cela signifie une réduction des risques associés au changement climatique. Viridis Terra aura contribué à sa mesure à l’atteinte des Objectifs de développement durable adoptés par les Nations Unies, les « 17 objectifs pour sauver le monde ».
Ces données proviennent d’un rapport technique préparé par Benoit Limoges, consultant international en biodiversité et services écosystémiques.